La force majeure est-elle une cause d’exonération de responsabilité civile?


Seminararbeit, 2017

31 Seiten, Note: 15


Leseprobe


Table des matières

Table des matières

Bibliographie

Introduction

I) Une nature juridique hétérogène de force majeure à cause des différences entre les matières contractuelle et délictuelle ?
A) La libération du débiteur de l’exécution de l’obligation due comme effet de la force majeure contractuelle, nature juridique autonome de l’exonération ?
1) La « libération » du débiteur et l’extinction de l’obligation
2) Le principe de l’effet exonératoire absolu de la force majeure, irresponsabilité sans destruction du fait générateur
B) Les vraies différences délicates en matière de fondement et des conditions de la force majeure contractuelle et délictuelle : le triptyque obsolète
1) La volonté d’unification des régimes de la force majeure contractuelle et délictuelle
2) Les différences subtiles dérivant de la jurisprudence non constante se manifestant dans le projet de réforme de mars 2017

II) L’effet conservatoire de la force majeure en matière contractuelle, rééquilibrage par adaptation de l’effet exonératoire absolu
A) L’exonération pour force majeure dans les rapports contractuels instaurant un système de répartition des risques entre les cocontractants
1) L’effet extinctif entraînant la caducité du contrat dans l’ancien Code civil
2) La disparition du contrat de plein droit, la répartition des risques dans le Code civil actuel
B) L’adaptation ou le refus de l’effet exonératoire pour des raisons d’équité ou des raisons politiques, remède à l’effet « fruste et trop vigoureu[x] » sur le lien contractuel ?
1) La suspension de l’exécution du contrat en cas d’empêchement temporaire, l’effet suspensif
2) La réduction du contrat, préservation du lien contractuel
3) La force majeure partiellement exonératoire en matière délictuelle
4) Le doute d’un effet équitable de la force majeure en dehors de ces hypothèses d’effet conservatoire
5) L’exceptionnel écart de l’effet exonératoire de responsabilité, instauration d’un système de garantie ou d’indemnisation automatique à la charge du débiteur

III) Conclusion

Bibliographie

Thèses :

- Antonmattei, Paul-Henri, Préface de Bernard Teyssié, Contribution à l’étude de la force majeure, L.G.D.J, E.J.A., Bibliothèque de droit privé tome 220, 1992 Paris. (Cité comme Antonmattei, Force majeure ).

- Chabas, Cécile, Préface de Jacques Ghestin, L’inexécution licite du contrat, L.G.D.J, E.J.A, Bibliothèque de droit privé tome 380, 2001 Paris (Cité comme Chabas, L’inexécution licite du contrat ).

- Genicon, Thomas, Préface de Laurent Leveneur, La résolution du contrat pour inexécution, L.G.D.J, E.J.A, Bibliothèque de droit privé tome 484, 2007 Paris.

- Jourdain, Patrice, Recherche sur l’imputabilité en matière de responsabilité civile et pénale, Thèse Paris 1, 1982. (Cité comme Jourdain, Recherche sur l’imputabilité ).

- Juen, Emmanuelle, Préface de Eric Loquin, La remise en cause de la distinction entre la responsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle, L.G.D.J, Lextenso éditions, Bibliothèque de droit privé tome 568, 2016 Paris. (Cité comme Juen, Remise en cause de la distinction responsabilité contractuelle/ délictuelle ).

- Radouant, Jean, Du cas fortuit et de la force majeure, Thèse Paris, Rousseau 1920. (Cité comme Radouant, Du cas fortuit et de la force majeure ).

- Thibierge, Louis, Préface de Laurent Aynès, Le contrat face à l’imprévu, Edition Economica, 2011 Paris. (Cité comme Thibierge, Le contrat face à l’imprévu ).

- Voirin, Pierre, De l’imprévision dans les rapports de droit privé, Thèse Nancy, Vagner 1922. (Cité comme Voirin, De l’imprévision dans les rapports de droit privé ).

- Williatte-Pellitteri, Lina, Préface de Françoise Dekeuwer-Défossez Contribution à l’élaboration d’un droit civil des événements aléatoires dommageables, L.G.D.J, Lextenso éditions, Bibliothèque de droit privé tome 457, 2009 Paris. (Cité comme Williatte-Pellitteri, Evénements aléatoires dommageables ).

Manuels :

- Bacache-Gibeili, Mirelile, Droit civil tome 5, Les obligations - La responsabilité civile extracontractuelle, Ed. Economica Paris, CorpusDroitPrivé, 3e édition 2016. (Cité comme Bacache-Gibeili, La responsabilité civile extracontractuelle ).

- Buffelan-Lanore, Yvaine, Larribau-Terneyre, Virginie, Droit civil - Les obligations, Editions Dalloz Paris, 15e édition 2017. (Cité comme Larribau-Terneyre, Les obligations ).

- Fabre-Magnan, Muriel, Droit des obligations. 1- Contrat et engagement unilatéral, Thémis droit puf, Presses universitaires de France, 4e édition mise à jour 2016 Paris. (Cité comme Fabre-Magnan, Droit des obligations ).

- Jourdain, Patrice, Les principes de la responsabilité civile, Editions Dalloz Paris, 9e édition 2014. (Cité comme Jourdain, Les principes de la responsabilité civile ).

- Larroumet, Christian, Droit civil tome 3, Les obligations - Le contrat, Ed. Economica Paris, CorpusDroitPrivé, 1e éd. 1986. (Cité comme Larroumet, Le contrat ).

- Starck, Boris ; Roland, Henri ; Boyer, Laurent, Droit civil, les obligations, tome 2 - contrat, 6e édition. (Cité comme Starck, Droit civil, les obligations ).

Articles de périodiques/ articles dans mélanges :

- Jégouzo, Laurence, L’application de la force majeure en droit des contrats ; dans Mélanges en l’honneur du Professeur Laurent Richier - A propos des contrats des personnes publiques, L.G.D.J, Lextenso éditions 2013 Paris, p. 355 à 364. (Cité comme Jégouzo, L’application de la force majeure en droit des contrats ).

- Jourdain, Patrice, Droit à réparation. - Lien de causalité, JurisClasseur Responsabilité civile et Assurances, Fasc. 161. (Cité comme Jourdain, J.-Cl. Resp civ et ass, Fasc. 161).

- Wigny, Pierre, Responsabilité contractuelle et force majeure, RTD civ 1935, p. 19.

Notes/ observations de jurisprudence :

- Atias-Letremy, Christian, note sous Paris 17 décembre 1974, D. 1975, p. 521.

- Esmein, Paul, note sous Cass civ 2e, 13 mars 1957 : D. 1958, p. 73.

- Planiol, Marcel, obs. sous Paris 8 février 1896, D. 1896, Jur. p. 456.

Autres :

- Cornu, Gérard, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 11e édition mise à jour, P.U.F. 2016 Paris. (Cité comme Cornu, Vocabulaire juridique ).

- Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, https://www.legifrance.gouv.fr/eli/rapport/2016/2/11/JUSC1522466P/jo/texte

Introduction

« Le monde n'est ni joyeux ni cruel. Il est simplement aléatoire » (Innocent - Harlan Coben).

Le mot aléa vient du terme latin alea, ce qui signifie jeu de dés. L’étymologie de ce terme nous explique ce que veut dire que quelque chose est « aléatoire ». Pour qu’il y ait un jeu de dés, il faut d’abord une action d’une personne, ce qu’exprime que l’homme est en fait la raison de l’aléa. Cependant, l’homme n’a pas de maîtrise concernant l’aléa, il lui échappe.1

La force majeure se situe sur le terrain d’événements aléatoires. Elle est une notion utilisée de manière différente entre les non-juristes qu’en matière de droit. La force majeure est en fait fortement empreinte d’un sentiment qu’il ne doit pas y avoir de responsabilité en cas d’évènements exceptionnels,2 qu’à l’impossible nul n’est tenu. Cependant, il semble tout de même qu’un pourcentage de citoyens non-juristes ait un sentiment juridiquement correct de la responsabilité : dans une enquête faite pour un ouvrage de l’Université de Tours3 4, 30% des personnes interrogées estimaient correctement comme cas d’irresponsabilité pour force majeure une tornade qui fait tomber un pot de fleurs sur le rebord d’une fenêtre.

La signification de la force majeure en droit cependant n’est pas que d’un sentiment d’équité. En droit, notamment le constat qu’à l’impossible nul n’est tenu explique la signification de la force majeure.

La force majeure se place principalement sur le terrain de la responsabilité civile. « La responsabilité, au sens le plus large, est l’obligation qui incombe à quelqu’un de rendre compte de ses actes [...], elle suppose l’imputabilité »4. En matière civile, la responsabilité résulte d’un acte dommageable causé à autrui. La responsabilité est contractuelle en cas d’inexécution d’un contrat qui lie la victime et le responsable qui cause un dommage. La responsabilité est délictuelle, voire extracontractuelle, pour tous les autres cas : la responsabilité délictuelle stricto sensu résulte d’une faute intentionnelle, la responsabilité quasi-délictuelle résulte d’une faute non-intentionnelle ou du fait d’une personne ou une chose dont on doit répondre.5

Peu importe le régime applicable, il s’agit toujours de réparer un dommage - de « rétablir un équilibre rompu par le dommage »6. Le but de la responsabilité civile n’est pas punitif, la sanction envisagée est indemnisatrice.7

Le fait générateur de la responsabilité peut être soit la faute, soit le risque de la réalisation d’un accident. La faute n’est pas uniquement le fait générateur, mais aussi le fondement du droit à la réparation. En cas d’accident comme réalisation d’un risque, il n’y a pas de faute, mais la responsabilité est fondée sur le fait que la responsable doit prendre en charge le risque. Ensuite il faut déterminer le responsable. En cas de faute, le responsable est déjà prédéterminé - c’est celui qui a commis la faute. En cas de responsabilité pour risque, ce n’est pas forcément le responsable qui est à l’origine du dommage, il n’est pas l’auteur du dommage - c’est le cas pour la responsabilité du commettant du fait du préposé par exemple. Mais parfois le responsable est tenu parce qu’il est créateur du risque et en doit donc supporter les risques.8

Est-ce qu’il existe une vraie différence entre responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle ? Si un contrat est inexécuté, il y a en principe une exécution par équivalent pécuniaire de l’obligation inexécuté. On en pourrait déduire qu’il n’existe en conséquence aucune responsabilité contractuelle, ce ne serait qu’une exécution forcée de l’obligation due. Cependant, la doctrine majeure moderne et la jurisprudence ne suit pas cette conception. La réparation par dommages-intérêts est autonome de l’obligation inexécutée. Tout cela donne une autonomie de la responsabilité contractuelle. Cependant, la responsabilité délictuelle ne se confond pas avec la responsabilité contractuelle, il n’y a pas d’unité. Mais on attache toutefois les mêmes effets, des conditions similaires et tout cela car les deux responsabilités ont la même fonction réparatrice. La responsabilité délictuelle devient le principe, on se situe sur son champ d’application si les conditions de la responsabilité contractuelle ne sont pas réunies.9

Pour l’engagement de la responsabilité il faut encore une condition négative : l’absence de cause d’exonération.10 Ici est normalement située la force majeure par la doctrine majoritaire. La force majeure est en fait vue comme cause d’exonération totale, mais la nature juridique de celle-ci n’est pas tout à fait claire ; elle est encore à discuter ci-dessous. Mais non seulement la nature juridique fait l’objet de discussions. La notion-même n’est pas certaine, elle est beaucoup débattue en doctrine ainsi qu’en jurisprudence. Cela s’explique déjà par l’histoire de la force majeure en droit français.

Dans le Code civil de 1804, la force majeure n’était pas définie. L’ancien article 1148 énonçait simplement : « Il n'y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque, par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit ». Le Code civil faisait référence à l’exonération d’un débiteur en matière contractuelle pour force majeure sans la définir. En défaut d’une définition légale, la jurisprudence devait définir la force majeure.

Traditionnellement, la force majeure était définie par la jurisprudence comme un événement imprévisible, irrésistible et extérieur à celui qui l’invoque, ces trois conditions on appelle le « triptyque » classique de la force majeure. Les juges appliquaient la force majeure en matière contractuelle ainsi qu’en matière délictuelle, sans qu’il y ait une fondation textuelle qui imposait cela.

A un moment, la Cour de cassation a changé sa définition de la force majeure en matière contractuelle. La première chambre civile et la chambre commerciale ont, à partir de 1997, admis l’existence de force majeure uniquement à cause d’un événement irrésistible, sans faire référence à l’imprévisibilité ou l’extériorité.11 La deuxième chambre civile de la Cour de cassation cependant avait une autre conception de la force majeure. C’est pourquoi, pour mettre fin à cette divergence entre les chambres, étaient rendus deux arrêts par l’Assemblée plénière de la Cour de cassation en 2006.12 L’Assemblée plénière expliquait que, en matière délictuelle ainsi que contractuelle, il faut un événement imprévisible et irrésistible ; pour le contrat l’imprévisibilité s’apprécierait par rapport à la conclusion du contrat. Ce que manque dans ces arrêts est le caractère d’extériorité. La première chambre civile a réaffirmé cela dans un arrêt concernant la responsabilité délictuelle, elle définissait la force majeure par un événement imprévisible et irrésistible.13

La jurisprudence qui s’ensuivait et son utilisation de la force majeure étaient gravement critiquées en doctrine. Dans deux arrêts concernant le droit du tourisme, la Cour de cassation rend des décisions juridiquement contestables, la Cour de cassation « va outrepasser le droit pour rendre une justice qualifiable d’économie ou de sociale »14. Bien sûr que cela ne remet pas en cause la force majeure en soie, mais cela montre une conception très politique de la force majeure pour protéger la partie faible, notamment en matière de droit de consommation.15 La jurisprudence ainsi critiquée fera l’objet d’une discussion ci-dessous.

L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations a introduit plusieurs nouveaux articles portant sur la force majeure dans le Code civil. Tout d’abord, l’article 1218 al 1er du Code civil nous donne une définition de la force majeure, notamment en matière contractuelle, en vue mettre fin à des controverses de définition. L’alinéa 1er de l’article 1218 énonce : « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur ».16

Il est donc fait expressément référence à l’imprévisibilité et à l’irrésistibilité, les deux pouvant même être relatives, c’est-à-dire l’imprévisibilité fait référence à un événement qui ne pouvait être raisonnablement prévu au moment de la conclusion du contrat et l’irrésistibilité fait référence à des mesures appropriées.17 En fait, la définition légale semble ne pas avoir vraiment résolu la discussion concernant l’élément d’extériorité, ce que sera discuté plus tard. En plus, pour défaut de définition légale de la force majeure en matière délictuelle, il faudra aussi discuter s’il existe des différences.

Toutefois, la force majeure est souvent sans hésitation acceptée en tant que telle comme cause d’exonération de responsabilité civile sans s’interroger auparavant sur la nature juridique de cette notion. La question « La force majeure est-elle une cause d’exonération de responsabilité civile ? » mène donc d’abord à se demander de quelle nature juridique la force majeure est. Celle-ci pourrait bien être hétérogène suite à des différences entre les matières contractuelle et délictuelle (I). Ensuite on se rendra compte que la force majeure est beaucoup plus développée en matière contractuelle à cause de l’impact sur le contrat de la force majeure : par adaptation de l’effet exonératoire est attaché un effet conservatoire à la force majeure ; l’exonération est même parfois écartée (II).

[...]


1 Cf. Williate-Pellitteri, Evénements aléatoires dommageables, n° 1 à 3.

2 Cf. Antonmattei, Contribution à l’étude de la force majeure, n° 1.

3 Le sentiment de la responsabilité, Publications de l’Université de Tours, 1984.

4 Larribau-Terneyre, Les obligations, n° 2087.

5 Cf. Jourdain, Les principes de la responsabilité civile, p. 1 et s.

6 Jourdain, Les principes de la responsabilité civile, p. 2.

7 Cf. Ibid., p. 3.

8 Cf. Ibid., p. 27 et s.

9 Cf. Ibid., p. 31 et s.

10 Cf. Larribau-Terneyre, Les obligations, n° 2228.

11 Cass com, 1er octobre 1997 (Bull civ IV n° 240), Cass civ 1e, 17 novembre 1999 (Bull civ I n° 307).

12 Cass Ass plén, 14 avril 2006 (Bull civ n°5).

13 Cass 1e civ, 23 juin 2011 (Bull civ I, n° 123).

14 Jégouzo, L’application de la force majeure en droit des contrats, p. 361.

15 Cf. Jégouzo, L’application de la force majeure en droit des contrats, p. 361.

16 Cf. Larribau-Terneyre, Les obligations, n° 1869 à 1871.

17 Cf. Ibid.

Ende der Leseprobe aus 31 Seiten

Details

Titel
La force majeure est-elle une cause d’exonération de responsabilité civile?
Hochschule
Université Panthéon-Assas, Paris II
Veranstaltung
Mémoire pour le séminaire franco-allemand (Integrierter Deutsch-Französischer Studiengang)
Note
15
Autor
Jahr
2017
Seiten
31
Katalognummer
V1163453
ISBN (eBook)
9783346575104
ISBN (Buch)
9783346575111
Sprache
Französisch
Arbeit zitieren
Dominik Mieskes (Autor:in), 2017, La force majeure est-elle une cause d’exonération de responsabilité civile?, München, GRIN Verlag, https://www.grin.com/document/1163453

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