Mme de Graffigny Lettres d’une Péruvienne: Amour et amitié dans le roman épistolaire


Exposé Écrit pour un Séminaire / Cours, 2009

19 Pages, Note: Gut


Extrait


Table des matières

I. Introduction
I.I Un siècle mouvementé
I.II Au sein de l’H/histoire

II. Mme péruvienne (1675-1758)
II.I. Biographie

1. La découverte ou l’ignorance de l’amour– le destin de Zilia
1.1. Le Pérou- L’amour sacré, le Paradis perdu
1.1.1. L’amour et l’éducation – L’enfance de Zilia
1.1.2. Le sacré et l’Idolâtre p.8
1.2. Un Voyage entre amour, amitié et adolescence
1.2.1. L’inversion des rôles et la reprise du culte
1.3. La France- L’amitié et la découverte du corps
1.3.2. Le sentiment de l’amour s’oppose à l’amitié
1.4. Une écriture sensible et sentimentale
1.4.1. Un «Happy End» qui ne l’est pas ?
1.4.2. Conclusion

III. Bibliographie

I. Introduction

I.I. Un siècle mouvementé

Le XVIIIème siècle entraîne tous ceux qui partent à sa découverte dans un tourbillon de philosophie, de littérature, d’art et dans un mouvement d' « âme sentimentale ». Difficile d’échapper à la fascination de l’Orientalisme et d’Exotisme qui se développe peu à peu ou aux nouvelles Philosophies qui secouent les États plus que les guerres ne l’ont jamais fait. Chaque époque a son propre langage, et c’est surtout dans le roman épistolaire que l’on perçoit comme l’expression du nouveau sentiment, qui envahira toute l’Europe et qui sera consommé avec avarice puisque la philosophie de la Raison et des Lumières ne peut (plus) satisfaire entièrement les besoins d’une société en mouvement en route vers un tout nouveau monde.

Dans la production littéraire la voix des femmes, assez faible jusque-là s'élève et devient même plus puissante qu'elle ne le sera au siècle suivant où elle retombera dans le silence et l’oubli. C’est seulement au XXIème siècle, que l'on retrouvera ces trésors perdus au cours de l’histoire, et que Mme de Graffigny fera son retour parmi les vénérables noms de Rousseau, Montesquieu ou encore Voltaire, même si ces derniers ne font pas partie de cette génération de «Sentimentale» dont Diderot et Grimm se moqueront d’ailleurs largement dans leurs publications[1]. Malgré la critique, les résultats de vantes montrent le succès évident du sentimental aussi bien que du roman épistolaire. Dès lors, pour réussir, un ou une auteur de l’époque devait suivre la recette du succès : prendre le langage des lettres qui s’épouse au sentiment, tout en y mêlant un brin d’exotisme, une cuillérée de critique sociale, politique et ecclésiastique et un soupçon de philosophie, à faire revenir dans l’Histoire et à servir tout chaud au public affamé…

I.II. Au sein de l’H/histoire…

Mme Graffigny a su trouver la recette secrète pour atteindre le cœur de ses lecteur et lectrices qui ont suivi (et suivent encore) avec beaucoup d’attention l’histoire de la jeune Péruvienne Zilia à travers son enfance au temple puis les tourments de l’adolescence, toujours en suspens entre deux mondes, entre deux hommes, entre amour et amitié. Pour arriver au sein

du travail de Mme de Graffigny, on va regarder de près les structures complexes du texte, pour découvrir de quels «ingrédients» le personnage et la personnalité de Zilia sont constitués et comment tout son être se reflète dans les lieux, les liens humains et sous quelle forme s’expriment ses sentiments. Il s’agira aussi de voir si ce roman est un texte sentimental et ce qu'est exactement un texte sentimental. On révèlera les motifs principaux de l’histoire et dénouera si possible les fils narratifs pour en déterminer les idées centrales, tout en tenant compte de la critique adressée à la société vue par les yeux «innocent» de Zilia. Enfin, pour découvrir de quelle manière amour et amitié se manifestent dans le texte, on étudiera le rôle central de ces liens humains qui sont les plus importants pour la vie de personnages comme pour celle des lecteurs.

II. «Mme péruvienne» (1675-1758)

Pourquoi regarder de près l’auteur des Lettres d’une Péruvienne alors que l’ouvrage pourrait s’expliquer en soi? Peut-être pour le simple plaisir de gambader entre la fiction et les endroits très concrets de la vrai vie de Mme de Graffigny, pour partir à la recherche d’une société française corrompue, d’un sentiment perdu et de moments biographiques que l’on perçoit à travers les pages et les lettres de cette petite péruvienne. Telle Zilia, on embarque pour un voyage dont on ne sait où il nous mènera… Bien que Mme de Graffigny ne soit point (re)connue de nos jours, elle s'est entourée tout au long de sa vie de personnages comme Voltaire, Mme du Châtelet, Diderot, Rousseau et d’Alembert, qui, en revanche, font surgir en nos esprit toutes les pensées, littératures et philosophies que représente le XVIIIème siècle dans la réception d’aujourd’hui. De tels amis et rencontres ne passent pas inaperçus, et effectivement l'œuvre de Mme de Graffigny porte les traces de toutes ces idées échangées. Mais voyons de plus près la vie[2] de cette femme à l’époque des Lumières…

II.I. Biographie

Née 1695 sous le nom de Françoise d’Issembourg d’Happoncourt, elle est rapidement mariée (en 1712) à François Huguet de Graffigny, qu’elle quittera onze ans plus tard, après la mort de trois enfants et une forte mésentente avec cet époux.

À la cour de Lorraine, elle va trouver amitié et amour sous les traits d'Antoine Devaux (surnommé Panpan) et de Léopold Desmarets. Tandis que sa première relation amoureuse se perd tout au long des années suivantes, l’amitié nouée avec Panpan l’accompagnera tout au long de sa vie et de sa production littéraire. En revanche Devaux, qu’elle soutient dans ses productions autant qu’il la soutient dans ses propres ouvrages prononcera ces vers dédiés à son amie :

Graffigny, je dois tout à votre amitié tendre

Cet ouvrage est à vous, je ne puis vous l’offrir.

S’il a quelques beautés, vous sûtes l’embellir,

Je ne vous donne rien, je ne fais que vous rendre.[3]

Avec un tel éloge de l’amitié, on ne s’étonnera point du rôle central de ce sentiment dans Les lettres d’une Péruvienne. Dans son roman, Mme de Graffigny fait non seulement découvrir le langage du sentiment, mais elle restitue aussi avec beaucoup de soin l’art de l’échange épistolaire, en raison de l'usage quotidien qu'elle faisait de cette forme de communication. On peut mentionner comme un exemple parmi tant d’autres ici son échange enrichissant et amical avec un des «grands» de l’époque : Voltaire, qui lors de la parution des Lettres d’une Péruvienne va lancer « on m’a mandé que l’Esprit et le Sentiment de madame de Graffigny avaient réussi»[4].

Et en effet, la parution des lettres de Zilia en 1747 étaient un des grand succès littéraire à l’époque[5] – influencé certainement par un orientalisme et un exotisme que l’on rencontre entre autres dans les lettres persanes de Montesquieu, mais aussi, à l'opposé de ce mouvement d’authenticité nouvelle du sentiment, la figure du bon sauvage de Rousseau, ce «sauvage» idéal qui est chassé de son paradis par une civilisation corrompue débarquant sur son territoire. Mme de Graffigny essayera, tout en l'idéalisant, de se référer à un peuple éteint depuis plus d’un siècle, en se s'appuyant sur des faits historique et en expliquant aux lecteurs la culture des Incas. Elle n’a cependant jamais pu en avoir une connaissance directe et c'est seulement à partir de différents œuvres, notamment celle de Rameau, Les Incas, qu'elle redonne vie à cette civilisation.

Tandis que le Pérou (historique) de Zilia n’existe en grande partie que dans l’imagination de l’auteur, les lieux qu’elle visitera en France sont bien plus concrets, et sont justement ceux qui jalonnent la vie de Mme de Graffigny : en 1735 par exemple, elle réside à Cirey, chez Mme du Châtelet et Voltaire. Or, dans la résidence de Mme du Châtelet, on perçoit facilement celle de Zilia, avec ces grandes fenêtres, miroirs et galeries splendides qui en quelque sorte représentent un temple ouvert à la nature qui l’entoure. À part ces lieux, on retrouve surtout la société française qu’elle ne connaît que trop bien, la noblesse superficielle de Paris (qu’elle a pu rencontrer tout au long des années vécue dans la capitale à partir de 1742) et aussi parmi tant de niaiserie, les quelques perles précieuses que sont les poètes, écrivains et âmes éclaircie qu’elle rassemblera autours d’elle dans son propre petit salon. À la fin de sa vie, c’est le retour vers la nature et la foi qui vont la marquer, puisqu'à soixante ans, elle se met à entretenir une liaison très intense avec un jeune prêtre-écrivain, qui va la nommer « Maman » et qu’elle considéra comme « son petit » et son partenaire pour des échanges théologiques. À la fin d’une vie mouvementée, elle semble suivre l’exemple de sa propre création, Zilia, en se retirant de l’agitation mondaine pour vivre une vie simple, même si elle ne peut se résoudre à quitter la ville pour de bon :

Je marchais sans désirs, sans passions, sans affaires […] jugez de mon étonnement quand, dans mon abandon, j’ai vu mon âme pour la première fois.[6]

En 1758 Mme de Graffigny, qui a fait voyager ses lecteurs par l’imagination à travers les lettres de Zilia, va elle-même embarqué pour ce long voyage dont nul ne sait où il l'a mené : elle mourra peu après l’échec d’une de ses pièces de théâtre en laissant derrière elle beaucoup de dettes malgré ses succès littéraires.

[...]


[1] Denby, David J. 1994. Sentimental Narrative and the Social Order in France, 1760-1820. Cambridge: Cambridge University Press. p.9.

[2] Dates issue de la chronologie, p. 26-33, dans: Graffigny, Françoise de. 2005. Lettres d’une Péruvienne. Paris : Editions Flammarion.

[3] Dans: Mercier, Gilbert. 2008. Madame Péruvienne. Françoise de Graffigny, une femme sensible au siècle des Lumières. Paris : Editions de Fallois. p. 218.

[4] Dans: Mercier, Gilbert. 2008. Madame Péruvienne. Françoise de Graffigny, une femme sensible au siècle des Lumières. Paris : Editions de Fallois. p. 6.

[5] Après la première parution des Les lettres d‘une Péruvienne, ces dernières vont être rééditées quarante-deux fois jusqu’à la fin du siècle, ce qui représente un des plus grand succès en librairie.

[6] Dans: Dans: Mercier, Gilbert. 2008. Madame Péruvienne. Françoise de Graffigny, une femme sensible au siècle des Lumières. Paris : Editions de Fallois. p. 223.

Fin de l'extrait de 19 pages

Résumé des informations

Titre
Mme de Graffigny Lettres d’une Péruvienne: Amour et amitié dans le roman épistolaire
Université
University of Vienna  (Romanistik)
Cours
Seminar zum französichen Briefroman
Note
Gut
Auteur
Année
2009
Pages
19
N° de catalogue
V128979
ISBN (ebook)
9783640351701
ISBN (Livre)
9783640351282
Taille d'un fichier
476 KB
Langue
français
Annotations
Es handelt sich bei dieser Analyse um die besondere Betrachtung des Genres Briefroman unter den Aspekten Freundschaft und Liebe.
Mots clés
Graffigny, Lettres, Péruvienne, Amour
Citation du texte
Sara Claire Kerschbaumer (Auteur), 2009, Mme de Graffigny Lettres d’une Péruvienne: Amour et amitié dans le roman épistolaire, Munich, GRIN Verlag, https://www.grin.com/document/128979

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