Le néo-français vu par la linguistique et dans les romans de Raymond Queneau


Epreuve d'examen, 2005

88 Pages, Note: 1,0


Extrait


Table de matières

Introduction

1. Le néo-français et l’ortograf fonétik
1.1. La théorie du néo-français
1.2. Une nouvelle langue s’impose
1.3. La « crise du français »
1.4. Errata
1.5. Conception du néo-français
1.5.1. Le lexique
1.5.2. La syntaxe
1.5.3. L’orthographe
1.5.4. La morphologie

2. Le néo-français vu par la linguistique
2.1. Vers une définition du français parlé
2.2. Code parlé et code écrit
2.3. La notion de norme
2.4. La variation diasystématique
2.5. Un français parlé outre les registres (registerneutral) ?
2.6. De l’oral à l’écrit
2.7. La théorie de Queneau sous l’angle de la linguistique

3. Le néo-français dans les romans de Raymond Queneau
3.1. Les aspects universels du parlé
3.1.1. La prononciation
3.1.2. La syntaxe
3.1.3. La macrosyntaxe
3.1.4. La sémantique
3.1.5. Les phénomènes suprasegmentaux et le paralangage
3.2 Les phénomènes particuliers du français parlé
3.2.1. La prononciation
3.2.2. La morphosyntaxe
3.2.3. Le lexique
3.3. La variation diasystématique dans les romans
3.3.1. Le matériau variationnel
3.3.2. La variation diastratique
3.3.3. La variation diaphasique
3.4. Les « néo-graphies »
3.5. Le néo-français : révolution langagière ou moyen stylistique ?

Conclusion

Bibliographie

Littérature primaire

Littérature sécondaire

Mais qu’est-ce que le français? Et qui parle le français ? Les Français qui s’adressent aux Français et non les grammairiens aux grammairiens. Si les Français ne veulent plus de l’imparfait du subjonctif, ni du passé défini, c’est comme ça. On ne peut pas les y obliger. Surtout pas les grammairiens.

(Raymond Queneau, « Écrit en 1955 » in Bâtons, chiffres et lettres. Éditions Gallimard : Paris, 1965 (¹1950), p.70)

Introduction

Raymond Queneau naît en 1903 au Havre, au sein d’une famille bourgeoise (cf. Blank 1991 : 188). Dans On cause (in Queneau 1965 : 53), il précise : « Moi aussi, je suis un bourgeois. J’ai même eu une enfance très, très bourgeoise.» A cause de cela, on peut présumer que son langage n’est ni marqué par la variété géographique du Havre, ni du français populaire. Il prétend avoir analysé le patois havrais pendant sa jeunesse (cf. Queneau 1962 : 72) et n’avoir rencontré le français populaire que très tard (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 16).

En tant que jeune homme, il fréquente le groupe des surréalistes (cf. Blank 1991 : 189). Il se sépare d’eux en 1929. Queneau déclare que c’est à cause des différences privées entre André Breton et lui ; pourtant, il se distingue d’eux également par sa tendance au formalisme qui va contre l’idée d’écriture automatique des surréalistes (cf. Blank 1991 : 189). La rupture se manifeste principalement avec le pamphlet ironique intitulé Dédé, dans lequel Queneau attaque Breton (cf. Queneau, Anne-Isabelle 2002 : 67). Pourtant, on peut cerner une influence surréaliste[1] dans l’œuvre de Queneau, notamment avec son exploitation de la psychanalyse dans ses romans, et aussi dans le néo-français.

Queneau est très marqué par son voyage en Grèce en 1932 (cf. Queneau, A. 2002 : 73), qui constitue le point de départ de ses préoccupations langagières et qui joue un rôle déterminant dans la genèse de son premier roman le Chiendent (voir p.9).

Quant aux autres romans de Queneau, il faut préciser qu’ils ne contiennent pas tous du néo-français. Son roman Odile (1937), par exemple, est écrit dans un français très classique (cf. Langenbacher 1981 : 161). Queneau a un succès énorme avec ses Exercices de style en 1947. Il écrit aussi de nombreux poèmes. Les exemples les plus connus sont son « roman en vers » Chêne et Chien de 1937 (cf. Queneau, A. 2002 : 87-88) et les Cent milliards de poèmes (1961) qui visent déjà à l’OuLiPo (cf. Blank 1991: 190), l’Ouvroir de la Littérature Potentielle. L’ OuLiPo est un groupe fondé par Raymond Queneau et François Le Lionnais en 1960 qui présente de nouveaux procédés littéraires avec des structures souvent mathématiques (cf. Littérature Potentielle in Queneau 1965 : 292-320).[2] Dans ce projet, on voit aussi le penchant de Queneau vers les mathématiques qui est à la base de son formalisme. Queneau travaille en tant que lecteur chez Gallimard à partir de 1938 et, en 1951, il est nommé membre de l’Académie Goncourt. Il meurt en 1976 (cf. Blank 1991 : 190).

D’un côté, on peut observer une tendance formaliste et analytique dans l’œuvre de Queneau et de l’autre, s’y montre une volonté à vouloir transgresser les normes littéraires. Mélangées à une bonne portion d’humour, on retrouve ces deux tendances dans son projet de néo-français et dans ses romans.

Un autre aspect important dans la vie de Queneau est son époque. Queneau vit et écrit dans un temps où de grands changements ont lieu. Dans la littérature, les règles classiques sont enfreintes et le français parlé trouve sa place dans les romans (voir p.15). Au niveau technologique, ce sont les nouveaux médias et les méthodes d’enregistrement qui influencent la langue et son étude (voir p.35). En plus, du début du 20e siècle jusqu’aux années soixante, les théories linguistiques ont également changé (voir p.27).

Comme l’œuvre de Queneau est complexe, elle peut être vue sous des angles très différents. Il existe plusieurs études littéraires[3] portant sur ses romans et ses poèmes. Pourtant, l’aspect de la langue est toujours présent, parce qu’il s’agit d’un point central chez Queneau. La plupart des écrits sur Queneau et son œuvre mentionnent quelques aspects de son langage, mais il n’y a que très peu d’ouvrages (voir dans la suite) qui analysent le néo-français en tant que point central.

Il faut préciser qu’il existe aujourd’hui quatre revues sur Raymond Queneau (Temps mêlés, Les Amis de Valentin Brû, Lectures de Raymond Queneau et les Cahiers Raymond Queneau). En plus, de nombreux colloques sur l’auteur ont eu lieu depuis 1984 (à Verviers, Limoges, Thionville et au Luxembourg). Dans toutes ces recherches, l’aspect principal qui y est traité est le côté littéraire de son œuvre. Seul le colloque de 1992 à Limoges a traité du sujet « Queneau et les langages ».

Daniel Delbreil (cf. 2003: 69) distingue deux phases de la critique quenienne. La première est celle des contemporains et des amis de Queneau et la deuxième celle qui suivit sa mort en 1976 et qui englobe surtout des études universitaires. L’étude universitaire de Queneau à partir des années 1960 s’interroge sur la dimension linguistique dans la théorie du néo-français et dans les romans. Au début, il s’agit plutôt de vues d’ensemble qui traitent le sujet du néo- français parmi d’autres aspects. Ici sont à nommer le livre sur Raymond Queneau de Paul Gayot (1967) et l’essai de Jean Queval (1971). Dans le livre d’Andrée Bergens (1963) apparaît un chapitre entier sur le langage dans lequel elle met l’accent sur le comique en que le néo-français sert uniquement au divertissement.

A côté de cela, il existe plusieurs réactions critiques dans des revues, comme celle de Roland Barthès en 1959, lors de l’apparition de Zazie dans le métro, ainsi qu’une critique de Jean Blot en 1969. En réaction à l’ Errata de Queneau en 1969 sont publiés les deux essais de Jean-Paul Bordufour (1970) et d’André Blavier.[4]

On trouve des analyses du langage de Zazie dans le métro dans la thèse de doctorat de David Michelson (1969), et des graphies dans l’ouvrage sur la phonostylistique de Pierre Léon (1971). On retrouve pour la première fois une analyse exhaustive de tous les romans de Queneau dans un livre d’Ernst Kemmner en 1972 et, presque dix ans plus tard, dans la monographie de Langenbacher (1981). Les deux ouvrages examinent la réalisation du néo-français dans les romans de Queneau. Contrairement à Jutta Langenbacher, qui fait aussi une analyse quantitative de certains phénomènes du parlé, Kemmner met l’accent sur les jeux de mots. Encore dix ans plus tard, en 1991, paraît une étude d’Andreas Blank basée sur celles de Kemmner et Langenbacher. Il analyse principalement le Chiendent, avec un bref aperçu de Zazie dans le métro, sous l’aspect de l’oralité dans un roman et le compare avec l’œuvre de Ferdinand Céline.

Les écrits sur Queneau qui suivent traitent principalement d’autres thèmes. En 1998 paraît encore un livre de Debon consacré en partie à la question de la norme chez Queneau. Dans la même année, Jérôme Meizoz (1998) écrit un article sur le néo-français de Queneau qui résume la problématique. La revue Europe publie en 2003 une édition consacrée à Queneau, mais on y trouve surtout des articles descriptifs sur d’autres thèmes que le néo-français.

L’étude de Blank, qui paraît être la plus actuelle, considère le néo-français sous un aspect fonctionnaliste avec la théorie de Koch et Oesterreicher (1986). En se basant sur les recherches de Söll et de Coseriu, Koch et Oesterreicher analysent la langue parlée sous l’aspect fonctionnel de la communication. Cette perspective me semble prometteuse, car elle tient compte de facteurs à la fois internes et externes. Contrairement à Blank, qui met l’accent sur l’aspect d’oralité dans le roman, ce travail va aborder la question du français parlé dans la théorie et dans les romans de Queneau. Les phénomènes seront analysés selon les différents niveaux de la langue parlée (universel, particulier, variationnel) et je tenterai de définir le français parlé chez Raymond Queneau. Pour encadrer cette analyse avec des facteurs externes comme la norme, je me réfèrerai notamment à Françoise Gadet (2003a) et Henriette Walter (1988). Pour la question de l’orthographe, qui sera abordée au second plan, je me baserai sur les recherches de Claire Blanche-Beneviste (2003b).

La dernière analyse du néo-français, effectuée par Blank, remonte à plus de dix ans. Depuis, le cadre traditionnel de la communication a changé (notamment avec Internet et avec les téléphones portables) et il faut se poser la question si la problématique du néo-français de Queneau est encore actuelle.

Le problème de l’écart entre l’écrit et le parlé se pose toujours. Ce travail se positionne dans le contexte de la question plus générale de savoir ce qu’est le français parlé. L’introduction du français parlé dans la littérature a été une révolution menée par les écrivains au début du 20e siècle ; par conséquent, cette question paraît moins importante aujourd’hui qu’elle pouvait l’être à l’époque. Pourtant, les projets de réforme d’orthographe suscitent toujours des discussions publiques passionnées. Cet exemple montre à quel point les Français s’identifient au français classique et défendent son statut.

La théorie du néo-français de Raymond Queneau ne tient pas la promesse qu’elle donne dans les années 1930. Queneau lui-même reconnaît environ trente ans plus tard qu’il a échoué sur ce point. Ses romans ne témoignent pas d’une application systématique de sa nouvelle langue, et la théorie souffre de problèmes de définition. Trop vite, on aura porté un jugement sur le néo-français en affirmant qu’il ne faut pas prendre au sérieux la théorie de Queneau, et que les quelques exemples de néo-français sont le signe d’un simple amusement de sa part. Pourtant, Queneau s’avère un membre clairvoyant de la société contemporaine vis-à-vis l’évolution de langue, le problème de la norme et l’impact des médias sur la communication. En plus, il montre une grande sensibilité quant au langage des ses personnages.

Premièrement se pose donc la question de savoir ce que Queneau entend par le néo-français. Est-ce qu’il s’agit de transposer un français parlé dans la littérature ? Si cela est le cas, il faut s’interroger sur la manière dont il définit le français parlé. En plus, il est important de se poser la question de savoir si le concept du néo-français est le même dans la théorie que dans la conception du langage de ses romans. Deuxièmement, il faut poser la question de savoir quel objectif on peut attribuer au projet du néo-français. Est-ce vraiment un projet d’inventer une nouvelle langue, comme Queneau le prétend, ou s’agit-il plutôt d’une simple question stylistique ? Il en résulte une réflexion sur la question de savoir s’il est possible, dans une vue linguistique, de prendre au sérieux la théorie de Queneau.

Les deux aspects qui seront analysés dans ce travail sont d’une part la théorie du néo-français de Raymond Queneau et, d’autre part, ses deux romans le Chiendent et Zazie dans le métro comme exemples de l’application de ses idées sur la langue. Comme charnière entre ces deux aspects seront présentées des théories linguistiques qui serviront à éclaircir l’expression français parlé.

La première partie présentera la théorie du néo-français. Là seront abordés la base linguistique de la théorie du néo-français, son développement des années trente aux années soixante et une reconstruction de la conception du néo-français.

La deuxième partie constituera la mise en relief linguistique de la théorie de Queneau. D’abord, l’expression français parlé sera débattu et expliqué. Par la suite, il sera analysé sous trois aspects : d’un point de vue fonctionnaliste avec la théorie de Koch et Oesterreicher, sous l’aspect de la norme, et sous l’angle de la variation. Puis sera posée la question de savoir si l’on peut présumer l’existence d’un français parlé non marqué par la variation. Après un bref aperçu du problème de l’orthographe, les différents modèles linguistiques présentés dans ce travail seront appliqués à la théorie de Queneau.

Dans la quatrième partie, le phénomène du français parlé dans les romans de Queneau sera analysé selon les catégories fonctionnelles de Koch et Oesterreicher. Pour sujet d’étude, je prendrai le Chiendent (1933), qui est le premier roman de Queneau, et Zazie dans le métro (1959), qui est l’un de ses derniers. D’abord, les phénomènes universels qui peuvent créer une oralité dans le roman seront observés. Ensuite viendront les phénomènes particuliers du français parlé. En troisième lieu sera analysé l’importance de la variation dans les romans. Les phénomènes de l’ ortograf fonétik seront décrits séparément. A la fin sera abordée la question de savoir si le néo-français est une révolution langagière ou seulement un moyen stylistique de Queneau.

1. Le néo-français et l’ortograf fonétik

1.1. La théorie du néo-français

La théorie linguistique de Raymond Queneau, qu’il présente pour la première fois dans Écrit en 1937 et Écrit en 1955, est basée sur l’ouvrage Le Langage de Joseph Vendryes (1923). Dans Écrit en 1937, Queneau cite des passages de cette œuvre qu’il discute par la suite. Cet essai n’est publié que dix ans plus tard dans Les Lettres Françaises (cf. Meizoz 1998 : 351) et semble plus spontané que celui de 1955. Les thèses sont reprises dans Écrit en 1955, où elles sont plus élaborées quant à l’aspect linguistique (cf. Blank 1991 : 192).

Les deux textes, rassemblés dans Bâtons, chiffres et lettres, traitent de l’écart entre la langue écrite et la langue parlée[5], qui sont pour Queneau deux langues différentes. Il écrit aussi plusieurs textes courts sur ce thème, dont une partie se retrouve également dans Bâtons, chiffres et lettres. Il faut nommer notamment Langage académique, On cause, Connaissez-vous le Chinook ? et Il pourrait sembler qu’en France. Les autres essais paraissent en 1973 dans Le Voyage en Grèce. Parmi eux se trouve également un texte titré Errata, dans lequel Raymond Queneau révoque toute sa théorie du néo-français. Il existe également quelques conversations radiophoniques avec Raymond Queneau, dont une de Georges Charbonnier en 1962 et une de Georges Ribemont-Dessaignes (in Queneau 1965), qui sont importantes pour ce sujet.

La théorie du néo-français se développe au cours des textes et des entretiens qui couvrent une période de presque 40 ans. Andreas Blank (cf. 1991 : 218) observe dans ce développement une tendance au scepticisme langagier chez Queneau, lequel met de plus en plus en doute sa théorie qui, dans son premier écrit de 1937, semblait encore révolutionnaire.

Dans Écrit en 1937, Queneau décrit comment il a fait la connaissance du français populaire et à quel point celui-ci est devenu un sujet d’étude pour lui. Ayant grandi dans un milieu bourgeois (voir p.4), il n’entre en contact avec ce registre linguistique que par la lecture de la littéraire – comme Henri Monnier et Jehan Rictus – ainsi que de quelques journaux populaires. C’est ainsi qu’il prétend s’être aperçu très tôt de la divergence entre français écrit et parlé.[6] En plus, il a connu le français populaire, l’argot et le parigot pendant son service militaire durant lequel il ne comprenait pas certains mots de ses camarades.[7]

Cependant, l’événement déclencheur de ses préoccupations quant à l’écart entre le langage parlé et l’écrit est son voyage en Grèce (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 17). Pendant ce voyage, il observe la rivalité entre la catharevousa, la langue réellement parlée en Grèce, et la démotique qui se réfère à l’ancien grec. Finalement, l’utilisation de la démotique l’emporte sur la catharevousa et devient la norme d’usage. Prenant conscience de la situation en Grèce, il constate un problème semblable en France entre le français écrit et le français parlé.

Son point de départ est le problème, formulé par Vendryes, qui dit que le français écrit n’est qu’une « langue morte » comme le latin (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 16, citant Vendryes). Vendryes prétend que les différences entre la langue écrite et la langue parlée sont si grandes qu’il parle de « deux français ».

Il est difficile de dégager des écrits théoriques de Queneau une définition de ce qu’il entend par le « français parlé ». On peut cerner quelques distinctions faites par Queneau, mais le terme reste imprécis (cf. Langenbacher 1981 : 23-25). D’abord, Queneau définit le français écrit comme «français écrit ancien », « français dit classique », « ancien français », « français proprement dit » ou « français des grammaires » et l’oppose au français parlé, qui, à son tour, est désigné de « « mauvais » français », « français vivant », « français moderne » et «langue française véritable ». Le problème de cette définition est qu’il existe plusieurs registres du français parlé, par exemple le français familier, le français populaire et le français vulgaire. Queneau tient compte de ce problème dans quelques cas, mais il ne le fait pas toujours.

Premièrement, il distingue le français parlé de l’argot : «le danger à éviter est l’argot […]. Et que l’on comprenne bien qu’il ne s’agit pas de remplacer le français par l’argot […] » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 20). Plus loin dans Écrit en 1937 (in Queneau 1965 : 25), il écrit :

« Je n’ai d’ailleurs aucun respect, ni considération spéciale pour le populaire, le devenir, la « vie », etc. Mais précisément comme je ne vois rien de réellement sacré dans notre français contemporain, je ne vois plus aucune raison pour ne pas élever le langage populaire à la dignité de langage écrit, et source d’une nouvelle littérature, d’une nouvelle poésie. »

Dans ce contexte, on pourrait penser que le français parlé pour Queneau correspond au français populaire. Pourtant, dans Écrit en 1955, il fait la différence entre parlé et populaire.[8] Dans ce même essai, il écrit à la fin: « tout d’abord, il ne s’agit pas de prendre tel quel le langage populaire […] Il s’agit d’élaborer une nouvelle langue » (Écrit en 1955 in Queneau 1965 : 88). Finalement, dans Curieuse évolution du français moderne (in Queneau 1973 : 224) – le dernier essai de Queneau au sujet de la langue datant de 1970 – il souligne que la différence entre le langage parlé et écrit n’est pas déterminée par l’usage de termes argotiers ou populaires, mais par l’écart entre la prononciation et l’orthographe.

Selon la description de Queneau, il n’est pas possible de préciser si le français parlé correspond au registre familier ou populaire, ou s’il forme un propre registre. Par conséquent, il n’est pas certain du langage qui doit être à la base du néo-français. Ce problème sera analysé dans la partie suivante du travail (voir 2.1.).

Par contre, Queneau fait une distinction nette entre un langage parlé et un langage oral. Cette différence est décrite dans Écrit en 1955 (in Queneau 1965 : 81-86). Comme le prétend Queneau, elle doit sa découverte au magnétophone, qui offre la possibilité d’enregistrer tous les aspects des énonciations d’une personne qui échappent à la simple écoute. L’oral contient donc, contrairement au parlé, des éléments suprasegmentaux comme l’intonation, l’accent, le rythme et la durée, ainsi que des interjections et toutes sortes de bruit. Les gestes et la mimique jouent également un rôle important. C’est pour ces raisons que la structure syntactique de l’oral est très différente. Les phrases sont segmentées ou inachevées, et on y trouve des interruptions et des hésitations. Tous ces aspects font partie de l’oral et non pas du parlé. Cela est très important pour les dialogues – surtout dans les pièces de théâtre – si l’on veut rendre compte de la vraie conversation. Dans ses Entretiens avec Georges Charbonnier (cf. Queneau 1962 : 97), Queneau admet que la notation phonétique d’une langue ne peut pas représenter toutes les particularités de l’oral. Pourtant, il raconte qu’il a envisagé de transcrire les éléments de l’oral, ce qu’il a essayé en partie dans Zazie dans le métro, en indiquant les gestes en parenthèses.

Cependant, la vraie révolution ne consiste pas à rendre compte des éléments prosodiques et suprasegmentaux, mais à écrire le français parlé, qui constitue alors une nouvelle langue, contrairement à l’oral, qui découle plutôt d’un choix stylistique (cf. Queneau 1962 : 98).

1.2. Une nouvelle langue s’impose

Dans Écrit en 1937, Queneau cite des passages du Langage de Vendryes. Cet ouvrage, que Queneau qualifie d’« ouvrage magistral » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 14), est le point de départ de la théorie du néo-français. Vendryes soutient la thèse que l’évolution du français depuis le siècle classique a provoqué une scission et que, par conséquent, le français écrit est devenu une « langue morte », tandis que le français parlé, la langue vivante, suit l’évolution naturelle (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 16, citant Vendryes). Il annonce que le français connaîtra le même sort que le latin. Le français classique resterait alors comme langue archaïque et ne ferait plus que nourrir le vocabulaire d’une nouvelle langue vivante qui serait le français parlé.

Vendryes décrit avec cela ce que l’on pourrait nommer une diglossie, c’est-à-dire la coexistence de deux langues dans un même pays avec un statut différent (cf. Blank 1991 : 194). Queneau poursuit l’idée de diglossie. Il présume que cette nouvelle langue se trouve actuellement devant un processus de « passage […] de la phase orale à la phase écrite » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 14). Il va donc plus loin que Vendryes en proclamant la naissance d’une nouvelle langue non seulement parlée, mais aussi fixée par une nouvelle écriture.

Les exemples que cite Queneau pour souligner l’écart entre le langage écrit et le langage parlé sont également tirés de l’ouvrage de Vendryes (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 14-15, citant Vendryes). Le premier concerne la formation du pluriel, qui devrait se faire par le devant pour les noms commençant par une voyelle. Les autres exemples morphologiques (voir 1.5.4.) qu’il donne sont la disparition du passé simple et de l’imparfait du subjonctif dans le parlé. L’existence d’un vocabulaire différent (voir 1.5.1.) utilisé en parlant est un autre élément qui soutient sa thèse. En plus, il cite l’exemple de la particule –ti qui s’attache au verbe dans les phrases interrogatives. Il donne encore l’exemple du chinook, une langue dont la syntaxe ressemble à celle du français parlé, mais qui est très différente du français écrit (voir 1.5.2.).

Sur la base d’arguments de Vendryes, Queneau affirme qu’il faut faire naître une nouvelle écriture qui corresponde à la langue vivante parlée. « Il s’agit donc non de réforme, mais de création » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 25), proclame-t-il. Queneau dit alors qu’il ne suffit pas de réformer le français écrit, mais qu’une scission est nécessaire entre le vieux français littéraire et le nouveau français qui ne demande qu’à naître. Il compare la situation avec celle en Grèce. Les Grecs se trouvent aussi dans un stade de diglossie. La langue pure est la catharevousa, qui s’utilise dans le journalisme et la politique, tandis que la démotique, la langue populaire se prête à l’usage poétique (voir p.9). Queneau constate envieusement que les poètes grecs s’expriment dans la langue populaire, vivante, pendant qu’en France, ils se servent de la langue pure (voire puriste).[9]

Pour mener les Français d’un français parlé à un néo-français (ce qui oblige Queneau à passer nécessairement par le français écrit dit « pur »), il faut une révolution sous trois aspects : le vocabulaire, la syntaxe et l’orthographe (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 20). Pour le changement du vocabulaire, Queneau ne voit pas de grands problèmes. Il s’agit alors de franciser les emprunts aux langues étrangères, d’admettre les néologismes et certains mots familiers. Quant à la syntaxe, il constate que la révolution dans ce domaine a été menée par Céline. Mais pour élaborer un néo-français, il est nécessaire de réformer l’orthographe. Cet aspect, qu’il considère comme le plus difficile à achever, est indispensable pour former une nouvelle langue qui donnerait matière à une nouvelle poésie. L’argument que Queneau donne pour la nécessité de réformer l’orthographe est plutôt de nature stylistique ou esthétique. « Sans une notation correcte du français parlé, il sera impossible (il sera himpossible [ sic ]) au poète de prendre conscience de rythmes authentiques, de sonorités exactes, de la véritable musique du langage » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 21). Il est à préciser pour cet argument de Queneau qu’il parle là d’un langage oral. Car les aspects prosodiques comme le rythme et la sonorité exacte, ce qui comprend également l’intonation, ne sont pas non plus notés dans le néo-français. Toutefois, dans Écrit en 1955 (in Queneau 1965 : 82-83) il nous montre qu’il sait très bien distinguer l’oral du parlé. Il faut donc se poser la question si, en 1937, Queneau ne faisait pas encore la différence, ou si cette remarque est à prendre au sens figuré. Peut-être voulait-il seulement souligner le fait que le néo-français se trouve plus proche de l’oral que le « vieux » français écrit.

Pour donner un cadre graphique au néo-français qui soit proche de la prononciation, Queneau propose dans Écrit en 1937 (in Queneau 1965 : 23) une orthographe plus ou moins phonétique (voir 1.5.3.) qu’il nomme quelques pages plus loin « ortograf fonétik » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 26). Il modifie l’alphabet du français en supprimant quelques lettres qui lui paraissent superflues et en accordant un seul son à chaque lettre. Dans les lignes suivantes, il réalise cette nouvelle écriture en appliquant son orthographe proposée et en effaçant toute lettre qui ne se prononce pas. Il y fait donc un commentaire métalinguistique en écrivant sur « l’ ortograf fonétik » en orthographe phonétique. D’après lui, ce serait une pure question d’habitude et, en plus, il la trouve amusante (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 23).

Queneau nomme deux raisons pragmatiques en faveur de l’enseignement du néo-français. L’une est d’ « épargner à nos enfants une perte de temps » et l’autre de « faciliter aux étrangers l’apprentissage du français » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 22). Selon Queneau, les enfants qui arrivent à l’école n’apprennent pas l’écriture de leur langue maternelle, mais sont obligés à apprendre une nouvelle langue qui leur est étrangère : le français « pur » ou « soigné » qui est à la base du français écrit actuel. Si, par contre, on enseignait le néo-français à l’école comme norme parlée et écrite, les enfants n’auraient qu’à transmettre leur langue maternelle (le français populaire) à l’écrit.

Queneau considère aussi les problèmes, prévus par Vendryes, qui peuvent résulter d’une révolution langagière (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 23-24). Premièrement, les générations suivantes sont contraintes à apprendre deux français différents. Ici, Queneau reste muet. Il prend le saut à faire comme étant un mal inévitable. Le deuxième inconvénient mentionné par Vendryes est celui des textes imprimés en français qui seraient alors infirmés. A cet argument, Queneau répond que l’on pourra continuer à les lire en « vieux français » et que les plus importants d’entre eux pourront être traduits. Cependant, il reconnaît qu’il faut faire passer un changement de l’orthographe avec précaution.

Le schisme entre le français classique et le français moderne et populaire semble inévitable à Queneau. Il préconise la nouvelle langue, le néo-français, comme avenir langagier de la France. Pour cela, il donne deux arguments importants, une explication par l’évolution historique et une autre qui est de nature culturelle.

Sa première thèse est basée sur le développement de langue française pendant les siècles derniers (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 20). Le français lui-même étant né d’une forme vulgaire du latin, il n’a achevé sa formation qu’au 17e siècle en passant par plusieurs stades, comme le francien. Le français classique, qui est plus ou moins le français écrit actuellement, s’est fixé au temps du Bon Usage[10]. Si l’on considère cette évolution, il serait tout naturel que la langue française poursuive son cours et se transforme dans une nouvelle langue qui soit conforme à la langue parlée aujourd’hui. Queneau l’appelle le « troisième français » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 20). Le français écrit deviendrait alors une « langue morte » comme c’est le cas du latin aujourd’hui.

Ce raisonnement de Queneau paraît logique. Pourtant, il faut aussi tenir compte du fait que les circonstances d’autrefois, au temps du développement de la langue française, sont très différentes de la situation actuelle. La révolution du français et la fixation de la langue sont aussi un phénomène d’uniformisation. Avant cette période, bon nombre de patois divers sont parlés. Seulement dans le siècle du « Bon Usage » se constitue une norme du français qui, peu à peu, devient aussi la norme du langage savant. Aujourd’hui, il existe une norme écrite du français qui est répandue partout dans la francophonie. Les médias, la mondialisation et d’autres phénomènes sociaux ont sur la langue un impact considérable inexistant dans le passé (cf. Walter 1988 : 327-340). L’explication de Queneau n’est donc plus complètement valable.

L’autre argument qu’il donne pour le besoin du néo-français est une raison culturelle. En conservant une « langue morte », le développement de la pensée stagnerait aussi. « Un langage nouveau suscite des idées nouvelles et des pensers nouveaux veulent une langue fraîche » (Il pourrait sembler qu’en France… in Queneau 1965 : 61). Selon Queneau, la littérature, la poésie, ainsi que toutes les disciplines savantes, dont la philosophie, ont besoin d’une nouvelle substance pour se développer. Ils ne peuvent pas traiter de l’actualité en utilisant une langue dépassée. Et de même, « le français ne deviendra une langue véritable et féconde que lorsque les philosophes eux-mêmes l’utiliseront, et naturellement les savants » (Il pourrait sembler qu’en France… in Queneau 1965 : 61). Mais Queneau constate que cela n’a pas encore eu lieu. On peut trouver le français parlé dans les dialogues des quelques romans et parfois aussi dans les passages narratifs, mais le néo-français n’est pas encore utilisé pour l’expression des idées scientifiques ou philosophiques. C’est ici que Queneau voit la véritable révolution à mener (cf. Connaissez-vous le chinook ? in Queneau 1965 : 56).

« Ce n’est certes pas aux professeurs à faire cette révolution du langage. Ce qui est étrange, c’est que cette transformation ait échappé à la plupart des écrivains, disons à presque tous jusqu’à ces dernières années » (Il pourrait sembler qu’en France… in Queneau 1965 : 60). Queneau insiste sur le fait que la révolution doit être dirigée par les écrivains et les savants. Selon lui, il n’est pas question que des linguistes ou des grammairiens élaborent une nouvelle langue. Le néo-français doit s’établir par son usage littéraire et scientifique. La tâche de l’écrivain est donc d’élaborer cette nouvelle langue et de former ainsi un outil pour les autres. Il observe pourtant que les poètes continuent d’écrire dans une langue puriste et que le français parlé dans les romans est généralement restreint aux dialogues. Pour expliquer cela, Queneau présume que la poésie est tellement éloignée de la vie ordinaire qu’elle ne forme qu’un supplément à la communication. En tant que telle, elle n’est pas forcément atteinte par la transformation de la langue (cf. Queneau 1962 : 101).

Avec Georges Charbonnier, il discute le fait que d’écrire en langage parlé est déjà une préoccupation courante au milieu du 19e siècle. Queneau nomme ici Balzac et Henri Monnier, qu’il désigne comme étant l’« un des premiers enregistreurs phonographiques du langage parlé » (Queneau 1962: 103). Queneau lit Monnier dans sa jeunesse, et il dit être influencé par son langage. Les écrits qui existaient auparavant, au 17e et 18e siècle, ne sont pas caractéristiques d’une littérature en langage populaire, selon Queneau. Il donne l’exemple de Vadé et François Villon. Ceux-là se sont servis principalement des patois et de l’argot. Queneau nomme Henri Monnier comme étant l’initiateur de son idée d’écrire en un langage populaire, ce qui signifie pour Queneau le langage parisien (cf. Queneau 1962 : 103-104). Comme il le prétend dans On cause, c’est aussi Charles Péguy qui l’influence. Sa poésie l’impressionne beaucoup. « Il le fait drôlement à la populaire, et souvent » (On cause in Queneau 1965 : 53). Il se réfère également souvent à Céline. Celui-ci est un contemporain de Queneau qui se sert aussi du français parlé dans ses romans. Son roman novateur quant à l’utilisation du langage populaire, Voyage au bout de la nuit, paraît en 1932, un an avant le Chiendent. On pourrait alors supposer une influence de Céline sur Queneau quant au langage. Cependant, selon l’analyse de Blank, le manuscrit du Chiendent est déjà terminé quand Céline publie son roman. Il est donc peu probable que Queneau ait pris ses idées de lui (cf. Blank 1991 : 4). Queneau parle de ce roman qui « avait entre-temps » paru et le désigne comme « premier livre d’importance » pour le français parlé actuellement (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 18). Il cite quelques passages et résume que la révolution langagière de Céline ne se fait pas seulement pour le vocabulaire, mais qu’il est l’un des premiers qui touche à la structure syntactique. Néanmoins, il critique l’écriture de Céline en disant « qu’il a contracté la manie des points de suspension, ce qui lui donne parfois un air un peu asthmateux » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 19). Toutefois Queneau reconnaît en Céline le réalisateur du premier roman dans lequel le français parlé apparaît aussi dans les passages narratifs, alors qu’auparavant, il était restreint aux dialogues. Dans On cause (in Queneau 1965 : 52-53), il observe que les auteurs des romans en langage parlé viennent pour la plupart du milieu bourgeois. Il en est ainsi pour Céline qui était médecin, mais aussi pour Queneau (voir p.4). Une autre remarque faite par Queneau est que la majorité des écrivains du néo-français ont une position politique qui est plutôt du centre ou de droite, comme Maurras et Hermant, qu’il qualifie de pétainistes. Pourtant, Queneau ne cherche pas à expliquer ces phénomènes, il les note simplement.

Il parle aussi à plusieurs reprises de son roman le Chiendent, paru quatre ans avant Écrit en 1937, son premier essai sur le néo-français. Malgré que sa théorie du néo-français n’était pas encore achevée à ce moment, on peut déjà y trouver de nombreux exemples de sa révolution langagière. Dans Écrit en 1937 (in Queneau 1965 : 18), Queneau résume qu’ « on y trouve beaucoup de photographies de langage populaire ». Il dit qu’il écrit toujours meussieu au lieu de monsieur et que il est toujours remplacé par i. De plus, il fait des élisions sans apostrophe, qu’il désigne comme « attache avec le passé » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 18). Son projet initial était d’écrire un traité de philosophie en néo-français. Il voulait alors traduire le Discours de la méthode de René Descartes en langage parlé. Avec cette intention, il a écrit le Chiendent. Ce n’est pas devenu un traité philosophique, mais un roman. En 1969, dans son Errata, Queneau reconnaît qu’il n’a jamais réalisé sérieusement cette idée qui demeurait toujours un projet (Errata in Queneau 1973 : 221).

1.3. La « crise du français »

Dans ses écrits, Raymond Queneau parle d’une vraie catastrophe quant à l’écart entre l’écrit et le parlé. Dans la Conversation avec Georges Ribemont-Dessaignes (in Queneau 1965 : 40), Queneau dit que les Français sont « à plaindre » parce qu’ils n’ont pas « le droit d’écrire comme ils parlent ».

Les Français ne s’en rendent souvent pas compte, prétend Queneau (cf. Il pourrait sembler qu’en France… in Queneau 1965 : 60). Ils croient pour la plupart parler un français standard « correct ». L’écart entre la langue écrite et parlée est dissimulé, entre autres, par la conservation de l’orthographe, par l’enseignement et par l’habitude de changer le registre selon les situations. En vérité, ils écrivent pour la plupart correctement, mais quand ils parlent, il s’agit d’une autre langue. Une réforme de l’orthographe révélerait ces divergences entre l’écrit et le parlé (cf. Queneau 1962 : 85). La discussion de ce problème commençait déjà au début du 20e siècle avec Gourmont et Darmesteter, et elle est décrite explicitement chez Vendryes en 1923. Après, cette idée se trouvait dans les pensées de Frei et Thérive. La grammaire des fautes d’Henri Frei (1929) est un ouvrage important (cf. Kemmner 1972 : 24-26). Encore dans les années soixante, Queneau retrouve la thèse de Vendryes sur la diglossie dans les Eléments de linguistique générale d’André Martinet de 1960.[11]

Pour visualiser les idées qu’il s’est faites sur l’état de la langue française, Queneau donne dans Écrit en 1955 des modèles coniques (cf. Écrit en 1955 in Queneau : 78-79).

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Le premier cône montre les divers états de la langue en général. La plus grande partie est occupée par l’oral. Puis viennent l’écrit et le littéraire qui se rattachent au normatif formant

Illustration 1: Modèles coniques de l’état de la langue française (cf. Écrit en 1955 in Queneau 1965: 78-79)

le sommet et ainsi la partie la plus petite de la langue. A ces états de la langue sont attribués dans le troisième schéma des genres différents. Les discours d’inauguration et les oraisons funèbres appartiennent à l’oral. Pour l’écrit sont donnés en exemple des rapports de gendarmerie et de la poésie parnassienne. La littérature en général est du genre littéraire, et l’Académie Française occupe le pic du grammatical normatif. Les parties rayées désignent l’état actuel de la langue écrite. Le troisième cône montre la langue qui est très éloignée de l’oral et se concentre surtout au sommet de l’Académie Française. L’aspect populaire est montré dans le deuxième schéma. Contrairement au troisième, on trouve ici une langue qui s’oriente à la langue parlée et qui se réfère à elle. Elle occupe une partie beaucoup plus grande du cône. Pendant que les trois premiers cônes sont des schémas synchroniques, le quatrième et le cinquième montrent aussi l’évolution dans le temps. Le troisième cône montre une image déformée par la grammaire normative et par la littérature qui se sont arrêtées, et l’oral qui a continué de se développer. Dans la cinquième image, le cône n’a plus tenu et s’est brisé. Il s’est produit une scission entre le stade de l’écrit et de la littérature. Il y a désormais deux langues. Une langue morte qui est restée dans le temps « tº» et dont n’existent plus que la grammaire fixe et quelques « débris littéraires ». Queneau modélise ici la manière dont il imagine l’avenir de la langue française (cf. Blank 1991 : 203). Il visualise la nécessité d’une scission entre le français classique dépassé et le français moderne. En plus, il veut montrer que dans la réalité, la plus grande partie de la langue est l’oral. Le troisième schéma présente donc une critique de la langue écrite s’orientant principalement à la grammaire normative. Il commente cette image en disant qu’elle représente une langue « perdant ses pédales » (Écrit en 1955 in Queneau 1965 : 78), parce qu’elle n’a plus sa source dans la langue réellement parlée. Queneau insère ces dessins dans Écrit en 1955, mais il ne donne pas d’explication supplémentaire dans le texte. Il écrit seulement quelques courts commentaires à côté. Les schémas sont une tentative de souligner ses thèses d’une manière abstraite et systématique. Le modèle du cône que développe Queneau et des indications comme par exemple « tº» pour désigner la dimension du temps lui prêtent un air sérieux. Par contre, des commentaires comme « perdant les pédales » ou « nécessité de balayer » (désignant le domaine de l’écrit ; Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 79) font de cet essai graphique plutôt une esquisse créative qu’un schéma scientifique.

Dans les entretiens avec Georges Charbonnier, Queneau discute de la nécessité d’une révolution langagière. Il se pose la question de savoir si elle se fait par une réforme ou par une scission. Queneau dit qu’un « idéal serait peut-être une langue en évolution constante » (Queneau 1962 : 76). Mais il n’est pas possible de réaliser cela, alors il faut une rupture à un moment donné. Comme l’écart est trop grand entre le français écrit et parlé, il est indispensable que la notation change. Pourtant, Queneau admet que cette révolution ne peut pas se faire en une fois et qu’il est également difficile pour lui de faire le saut pour passer à une nouvelle langue.

Quant à la réforme de l’orthographe, qui a toujours été vivement discutée, Queneau la juge moins importante. L’essentiel, selon lui, est de changer la syntaxe et le vocabulaire (cf. Queneau 1962: 74-76). Il parle à plusieurs reprises de réformer l’orthographe, mais, en réalité, il s’agit pour lui de constituer l’orthographe d’une nouvelle langue. « L’orthographe, les questions de traits d’union, de trémas, de trucs comme cela, ce sont des subtilités » (Queneau 1962 : 85). Par conséquent, Queneau ne croit pas qu’une réforme de l’orthographe poserait de graves problèmes. Pour lui, c’est tout simplement une question d’habitude. Il ne voit pas de raison pour ne pas adopter une autre orthographe. Contrairement aux langues sémitiques ou aux hiéroglyphes par exemple, les lettres n’ont pas de signification singulière (cf. L’écrivain et le langage in Queneau 1973 : 185). Queneau présume que la graphie du français n’est qu’une invention des imprimeurs dans le passé qui l’ont rendue assez compliquée pour avoir le monopole de l’orthographe. Ainsi il existait seulement une élite restreinte qui savait écrire correctement le français et qui en profitait, par exemple dans l’enseignement (cf. Queneau 1962 : 84). Cet argument voulant que l’orthographe ne soit qu’une convention provient également de Vendryes, cité par Queneau dans Écrit en 1937.[12] Queneau renforce cet argument en disant : « l’orthographe est plus qu’une mauvaise habitude, c’est une vanité » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 23). Il ne faut donc pas s’attacher si méticuleusement à un système de signes arbitraires, inventé par des hommes pour transporter la langue. C’est pour cette raison que Queneau ne prête pas tant d’attention à cette querelle d’orthographe. Par contre, une réforme de l’orthographe pourrait rendre visible l’écart entre le français écrit et le français parlé (selon Vendryes).[13] Pour Queneau, « l’adoption d’une orthographe s’impose, parce qu’elle rendra manifeste l’essentiel : la prééminence de l’oral sur l’écrit. Il s’agit donc non de réforme, mais de création » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 25). Et encore : « il s’agit, à mon sens, non de corriger l’orthographe de l’ancien français (celui que j’écris en ce moment), mais de choisir quelle orthographe donner au nouveau français » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 23).

Pendant que dans Écrit en 1937 et Écrit en 1955, Queneau développe surtout l’idée d’élaborer une nouvelle langue, c’est dans Langage académique, Il pourrait sembler qu’en France et dans les Entretiens avec Georges Charbonnier qu’il s’adresse aux adversaires dans cette querelle de la langue : les puristes. Les puristes représentent la grammaire normative et le conservatisme langagier, et Queneau nomme ici principalement l’Académie Française. Queneau critique cette attitude de vouloir conserver la langue française telle quelle. L’Académie Française s’oppose aux néologismes et aux emprunts des langues étrangères, notamment de l’anglais. C’est pourtant dans ce domaine que le nouveau français offre plus de possibilités que la norme écrite. Queneau donne l’exemple des procédés de dérivation ou d’agglutination dans la publicité comme dans « Kiravi » (cf. Queneau 1962 : 77). Pour Queneau, cela est une amélioration de la langue, dont les Français devraient être contents.[14] Comme puriste en particulier, Queneau se dirige contre Mallarmé, dont il juge la poésie impossible à prononcer avec une syntaxe morte (cf. L’écrivain et le langage in Queneau 1973 : 184). Selon l’opinion de Queneau, il ne faut pas essayer de conserver une langue vivante dans une forme qui ne correspond plus du tout à la réalité parlée, mais il faudrait plutôt l’enrichir. Ainsi, il se demande dans Langage Académique « si les fonctions efficaces d’une véritable Académie ne seraient pas justement une action à propos de la langue française pour en transcrire et en préparer les nouveaux aspects » (Langage académique in Queneau 1965 : 49). Il ne demande pas d’arrêter de purifier le français classique, mais de laisser le français vivant poursuivre son chemin dans l’évolution. Une Académie « idéale » devrait « préparer la mort du français sclérosé actuel et les possibilités d’une langue nouvelle » (Langage académique in Queneau 1965 : 49). Ceci est alors la solution que propose Queneau : de garder et d’enseigner le français classique comme une langue morte, à côté d’un néo-français qui se modèle sur le français vivant parlé (cf. Queneau 1962 : 71). De cette façon, le français classique reste une langue pure qui ne serait plus attaquée par l’évolution moderne. Avec l’enseignement de cet idiome classique, l’on pourrait encore lire les ouvrages dans un français puriste.

Queneau soutient la thèse selon laquelle la France se trouve face à une « crise du français » qui consiste en l’écart entre la norme du français écrit et le français parlé. Le moyen de sortir de cette misère est, selon lui, de faire une scission entre les deux idiomes et de créer une nouvelle forme écrite qui se réfère au français parlé. Entre-temps, le français puriste peut garder son statut en tant que français classique et peut être enseigné comme une langue morte. Par contre, Queneau ne donne aucun conseil pratique quant à la réalisation de cette révolution langagière. Il nomme quelques domaines à réformer et invente une ortograf fonétik qui pourrait servir de base à la nouvelle écriture. Il désigne cette nouvelle langue comme point d’arrivée, mais il ne veut pas imposer son ortograf fonétik comme norme (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 26).

1.4. Errata

Ayant été un sujet de discussion pendant quelques années, la théorie du néo-français est révoquée par Queneau lui-même dans un article intitulé Errata qui paraît en avril 1969 dans la Nouvelle Revue française.

« C’est que cette question du « néo-français » me paraît moins importante ; ou plutôt, je m’aperçois que les théories que j’ai soutenues à ce sujet n’ont pas été confirmées par les faits. Le « néo-français » n’a progressé ni dans le langage courant, ni dans l’usage littéraire. Au contraire, il a reculé. Le « français écrit » non seulement s’est maintenu, mais s’est renforcé. » (Errata in Queneau 1973 : 221-222)

Il voit la cause de ce nouveau développement dans les médias audiovisuels, la radio et la télévision. Ceux-ci diffusent un français correct qui influence les Français et les amène à contrôler leur façon de parler (cf. Errata in Queneau 1973 : 222). Queneau discute de l’influence importante des médias déjà dans les Entretiens avec George Charbonnier en 1962.[15] Il nomme le langage des médias comme étant une variante du français parlé qui est plus proche du français « correct » et qui provoque un ralentissement de l’évolution du français. Il prévoit même un recul de l’imprimé devant le document mécanique (cf. Queneau 1962 : 93). La télévision et la radio prennent un langage oral et, à partir de là, elles développent un langage stylisé et correct qui se rapproche de la norme. Ceci donne l’illusion aux gens qu’ils parlent une langue pure comme celle des grammairiens. Ce phénomène provoque alors un développement contraire à celui que prévoyait Queneau : le français parlé se forme à partir de l’écrit. Dans Curieuse évolution du français moderne (in Queneau 1973 : 225), Queneau parle d’une « déroute du néo-français ». Il dit que le français devient plus homogène par la diffusion des médias, mais qu’en même temps, les patois et dialectes sont menacés par ce développement. Dans les années précédentes, une telle évolution de la langue, incitée par la télévision, n’était pas prévisible. A cette occasion, il présume qu’« un facteur, que nous ne discernons pas actuellement, modifiera peut-être la tendance » (Curieuse évolution du français moderne in Queneau 1973 : 225). Ceci est curieux, parce que Queneau ne pouvait pas, à cet époque-là, prévoir le développement d’Internet ou des courts messages sur les téléphones portables. Effectivement, les nouveaux médias continuent d’influencer la langue. Mais cette évolution, Queneau ne l’a pas vécue, comme il est mort en 1976. Pourtant, on peut voir que Queneau observait attentivement le développement du français et qu’il a bien cerné l’impact considérable de la médiatisation et l’informatisation sur la langue.

1.5. Conception du néo-français

On ne trouvera nulle part une description élaborée du néo-français par Queneau. Les références sont dispersées à travers ses quelques écrits théoriques (voir 1.1.) et dans le langage de certains de ses romans. Comme Raymond Queneau le dit dans Écrit en 1937, il faut passer par une « triple réforme : l’une concerne le vocabulaire, la seconde la syntaxe, la troisième l’orthographe » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 20). Les deux premiers se trouvaient déjà chez Céline dans Voyage au bout de la nuit (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 19) . En question d’orthographe Queneau va plus loin que Céline (voir 1.2.).

1.5.1. Le lexique

En ce qui concerne le vocabulaire du néo-français, Queneau ne fait pas de propositions concrètes. Il le distingue très nettement de celui de l’argot[16] qui a son propre registre. En plus, il veut en arriver à plus de souplesse quant au choix du vocabulaire. Ainsi, il propose de ne pas reculer devant les néologismes et les emprunts aux langues étrangères adaptés au français (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 20). Il ne partage pas l’avis des puristes comme quoi la langue française est menacée par des termes d’autres langues. Le français devrait également, selon lui, admettre le processus de dérivation (voir p.20). Ceci apporterait un gain considérable au français, dans les cas où la langue puriste ne connaît pas d’autre moyen que de recourir au grec ou au latin (cf. Écrit en 1955 in Queneau 1965 : 79-80). Queneau ne nomme pas un spectre lexical spécifique au néo-français. Au contraire, il veut admettre toutes les tendances et nouveaux procédés du français moderne. Non pas pour nuire au français, comme le prétendent les puristes, mais pour enrichir la langue.

1.5.2. La syntaxe

La plus grande différence entre l’écrit et le parlé consiste pour Queneau en la structure différente de la syntaxe. Il décrit à plusieurs reprises la parenté entre la syntaxe d’une langue nommée chinook et un phénomène syntactique du français parlé. Cet exemple de Vendryes est cité pour la première fois dans Écrit en 1937 (in Queneau 1965 : 15) et, dix ans plus tard, il devient le point de départ d’un essai titré Connaissez-vous le Chinook ? (in Queneau 1965 : 56). Dans ce texte, il examine le phénomène, qu’il considère comme une structure fondamentale de la syntaxe du néo-français, et essaie de l’appliquer à son propre écrit. Le chinook est une langue indienne très écartée des langues indo-européennes. Cette langue a une structure syntactique très singulière. Toutes les indications de grammaire sont données au début de la phrase, tandis que le contenu sémantique vient après. Il compare cette structure du chinook avec une particularité du français parlé. Vendryes donne l’exemple « Elle n’y a pas encore voyagé, ta cousine, en Afrique » (Connaissez-vous le chinook ? in Queneau 1965 : 55, citant Vendryes). Dans la première partie de la phrase est nommé le sujet elle qui s’accorde avec le verbe et le pronom y pour indiquer un lieu. Ensuite, dans la deuxième partie sont données les précisions, c’est-à-dire les mots auxquels les pronoms font référence. La tentative de Queneau d’appliquer cette forme à son propre texte paraît par contre un peu échouée : « Ils l’ont depuis longtemps – les linguistes découvert – qu’il en avait quelques-unes avec – le français parlé contemporain, des ressemblances, certaines langues, etc. » (Connaissez-vous le chinook ? in Queneau 1965 : 56). Même dans un langage oral, une telle structure est peu fréquente. Queneau reconnaît qu’il est difficile de traduire de la langue écrite vers la langue orale en ne considérant que la syntaxe (cf. Connaissez-vous le chinook ? in Queneau 1965 : 56). Néanmoins, cette structure est très fréquente dans le français parlé quand elle concerne seulement un aspect. Il est fréquent de reprendre le désigné par un pronom, non seulement placé devant, mais aussi derrière. Ainsi, à côté des formes comme « Elle est marrante, ta petite nièce, dit Charles […] » (Zazie: 13) ou « Si j’en ai, des bloudjinnzes […] » (Zazie : 48), l’on trouvera aussi des phrases comme « Papa, il était donc tout seul à la maison […] » (Zazie : 54). En syntaxe chinookienne cela donnerait alors Il y était donc tout seul, Papa, à la maison.

En plus, il cite l’exemple de la particule –ti (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 14, citant Vendryes) qui s’attache au verbe dans les phrases interrogatives. Ici il s’agit d’un élément qui provient de la phrase d’interrogation inversée, par exemple dans aime-t-il [Emtil], qui, par une généralisation fautive du phonème [ti] comme morphème indiquant l’interrogation, devient par exemple j’aime-t-i (cf. Gadet 1992 : 80).

[...]


[1] Pour l’influence du surréalisme chez Queneau cf. Mrozowicki (1990), notamment les pages 73-74 pour le rapport entre le néo-français et le surréalisme.

[2] Pour savoir plus sur Queneau et l’ OuLiPo cf. leur page web [en ligne - consulté le 1.11.2005], disponible sur http://www.oulipo.net.

[3] Cf. par exemple Simonnet (1962) pour une analyse du Chiendent.

[4] Les deux textes sont rassemblés dans le Cahier de l’Herne en 1990 [¹1975] sous la direction d’Andrée Bergens. Le texte de Bordufour a déjà été publié en 1970. Le texte de Blavier apparaît aussi dans la Nouvelle Revue Française, probablement plus tôt.

[5] J’avertis que je ne ferai pas la distinction structuraliste entre langue et langage dans ce travail. Ces deux termes sont souvent utilisés comme synonymes.

[6] « Et puis il s’est trouvé que j’ai lu très jeune Henri Monnier et Jehan Rictus. C’est par là que j’ai commencé à connaître le langage populaire » (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 13).

[7] « Naturellement, le service militaire me servit d’école, et je fis mes classes – de français populaire, d’argot, de parigot, dialectes dont je n’avais alors qu’une connaissance rudimentaire » (cf. Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 16).

[8] « […] la langue parlée, je ne dis même pas la langue populaire » (Écrit en 1955 in Queneau 1965 : 64).

[9] « Malheureusement, ici, à quelques rares exceptions près, les poètes parlent la langue « pure » et les fonctionnaires et les journalistes aucune langue du tout » (Langage académique in Queneau 1965 : 48-49).

[10] Le « Bon Usage » désigne principalement la langue parlée à la cour au 17e siècle ; plus généralement il désigne la façon d’écrire et de parler correctement selon les règles de la grammaire française, qui ont commencé à s’installer pendant ce temps-là.

[11] Queneau parle d’un livre d’André Martinet qui vient d’être publié et qui reprend les mêmes idées que Vendryes (cf. Queneau 1962 : 68).

[12] « L’orthographe française est un système conventionnel établi de toutes pièces par la volonté de quelques savantasses. Ce qu’une convention a fait, une convention peut le détruire » (Écrit en 1937 Queneau 1965 : 22, citant Vendryes ).

[13] « Si l’on réalisait chez nous une réforme complète de l’orthographe, la différence de ces deux français éclaterait à tous les yeux » (Écrit en 1937 Queneau 1965 : 16, citant Vendryes).

[14] « […] puisque la langue française avait beaucoup de mal à dériver des mots, elle a trouvé un moyen de dériver des mots : eh bien elles [les personnes puristes] devraient s’en féliciter ! » (Queneau 1962 : 78).

[15] « C’est une chose qui modifie peut-être un peu ce que j’ai pu écrire précédemment à ce sujet » (Queneau 1962 : 69).

[16] « Le danger à éviter est l’argot » (Écrit en 1937 in Queneau 1965 : 20).

Fin de l'extrait de 88 pages

Résumé des informations

Titre
Le néo-français vu par la linguistique et dans les romans de Raymond Queneau
Université
University of Osnabrück  (Romanische Sprachen/ Französisch /Sprachwissenschaft)
Note
1,0
Auteur
Année
2005
Pages
88
N° de catalogue
V323136
ISBN (ebook)
9783668232099
ISBN (Livre)
9783668232105
Taille d'un fichier
1453 KB
Langue
français
Mots clés
Raymond Qeneau, Queneau, néofrancais, linguistique, francais parlé, Zazie
Citation du texte
Imke Bröhl (Auteur), 2005, Le néo-français vu par la linguistique et dans les romans de Raymond Queneau, Munich, GRIN Verlag, https://www.grin.com/document/323136

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